Batribox/Screlec : éco-organisme dédié à la collecte et au recyclage des piles et batteries usagées
Dans un monde où la gestion des déchets et la préservation de l’environnement deviennent des préoccupations majeures, certains acteurs se distinguent par leur engagement et leurs initiatives innovantes. Screlec-Batribox est l’un de ces éco-organismes, dédiés à la collecte et au recyclage des piles et batteries usagées, hors batteries « lourdes » comme celles des véhicules, engins de travaux publics, etc. Depuis sa création en 1999, cet éco-organisme a su mettre en place des solutions efficaces pour limiter l’impact environnemental des déchets de piles et batteries, tout en sensibilisant le public aux enjeux du recyclage.
Aujourd’hui, nous allons à la rencontre du Directeur Général de Screlec-Batribox, Emmanuel Toussaint d’Auvergne, qui partage avec nous sa vision, les défis rencontrés par l’éco-organisme et les perspectives d’avenir pour le secteur du recyclage des piles et batteries. Dans cet entretien exclusif, il nous dévoile les coulisses de leur mission et les stratégies déployées pour un avenir plus durable.
Quels types de piles et de batteries acceptez-vous pour le recyclage, et de la part de qui ?
Tout le monde, que ce soient des particuliers ou des professionnels, peuvent rapporter leurs piles et batteries usagées dans divers points de collecte (magasins de bricolage, supermarchés, entreprises, mairies, déchèteries, établissements scolaires…). Aujourd’hui, l’éco-organisme gère une catégorie de piles et de batterie qualifiée de « portable », c’est-à-dire jusqu’à 5 kilos. Au 1er janvier 2025, Screlec-Batribox aura un nouvel agrément basé sur le nouveau règlement européen qui encadrera l’extension de son gisement. Ainsi, celui-ci sera étendu à la totalité des batteries et piles existantes. Le gisement actuel de 30 000 tonnes passera à 600 000 tonnes à partir de 2025, ce qui aura pour conséquence de démultiplier par ailleurs son champ d’action.
Aujourd’hui, Batribox récupère plus de 6 200 tonnes ce qui fait un taux de collecte de +28 % par rapport à 2022 avec 4 832 tonnes collectées. Il s’agit cependant d’un gisement difficile à collecter, car il se cache facilement dans les habitations (piles dans les tiroirs, téléphones cassés ou qui ne fonctionnent plus, perceuse, tondeuse, jouets pour enfant).Les habitants ont, sans le savoir forcément, en moyenne une centaine de piles et batteries chez eux, dont 10 à 15 qui sont usagées. Ce sont ces piles et batteries que nous cherchons à récupérer grâce à nos collectes.
Où peut-on trouver les points de collecte les plus proches ?
À ce jour, Screlec-Batribox compte plus de 32 000 points de collecte sur tout le territoire français (métropole et Outre-Mer). Ces points de collecte sont situés dans les enseignes de grande distribution, dans les déchetteries, (pour les ordinateurs et horloges démantelés par exemple) ou encore dans les collectivités territoriales.
Retrouvez le lieu de collecte le plus proche de chez vous : https://www.batribox.fr/points-de-collecte/
Comment se déroule le processus de recyclage et de valorisation des piles ?
Lorsque les points de collecte atteignent 60 kilos, ceux-ci font une demande d’enlèvement à notre opérateur présent sur le département concerné afin de récupérer le gisement de piles et batteries collectées pour les massifier dans son centre. Puis, quand le volume permet de remplir un camion, un transporteur les apportent jusqu’au centre de tri où elles seront triées et séparées selon leur technologie. Une fois que les gisements rendus homogènes, c.a.d. un seul type de piles/batteries par gisement, ils partent en recyclage dans des usines spécialisées pour en extraire les métaux (cobalt, zinc, nickel, lithium) sous forme d’une poudre appelée « black mass » qui sera achetée par des industriels pour d’autres usages. Le reste de la pile et de la batterie est envoyé en incinération pour une valorisation énergétique.
Découvrez en vidéo le processus de recyclage des piles et ce qu’elles deviennent :
– https://www.youtube.com/watch?v=lUT7evSCkNQ
– https://www.youtube.com/watch?v=BNy_fePMkGQ
Pour les batteries issues des professionnels, nous allons directement chez des opérateurs de déchets comme Suez ou Veolia qui collectent les déchets des entreprises. C’est ce gisement professionnel qui va beaucoup augmenter avec notre nouvel agrément puisque nous récupérerons des batteries présentes dans les équipements à usage industriel.
Quelles sont vos opérations de collecte ?
Nous mettons en place des campagnes ou des partenariats avec des acteurs de l’économie sociale et solidaire qui ont des réseaux d’action plus importants que nos partenaires traditionnels.
Par exemple, nous avons un partenariat depuis 10 ans avec l’AFM Téléthon sous la forme d’une campagne annuelle : 1 pile = 1 don. Ainsi, les bénévoles du Téléthon collectent les piles qui sont à la maison et, en contrepartie des quantités collectées, Batribox remet un chèque de 250 euros pour chaque tonne de piles et de batteries collectées. Grâce à cette opération, nous avons réussi à convaincre une grande partie de la population de l’intérêt environnemental de la collecte des piles, associé à un facteur social. Pour l’édition 2024, nous avons ainsi collecté 145 tonnes et fait participer 485 personnes (sensibilisées) générant un don de 36 250 euros à l’AFM Téléthon.
Nous avons également une opération connue sous le nom de Piles Solidaires à destination des écoles et collèges en France (Métropole & Drom-Com) avec « Électriciens sans frontières ». Dans le cadre d’un programme de formation, nous demandons aux enfants de rapporter les piles dans leur classe et grâce à cette collecte nous finançons l’électrification d’une école ou l’équivalent dans un pays en voie de développement. Depuis le début de ce programme, nous avons financé des projets dans 10 pays dont :
- Maroc : projet d’installations de panneaux photovoltaïques pour alimenter le village en eau potable.
- Népal : projet d’hydro-électrification de trois écoles et un centre de soins.
- Guyane : projet d’électrification d’une école.
- Pour la 10e édition, Screlec-Batribox a sélectionné un projet d’envergure au Togo, projet d’électrification de 4 structures (écoles, atelier tisserand, bibliothèque et dispensaire).
Cette opération a réussi à mobiliser du public et à donner un sens aux gestes de collecte. En passant par les enfants, qui sont les écocitoyens de demain, nous sensibilisons aussi les parents, puisque les enfants vont eux-mêmes parler du projet à leurs parents. Nous produisons d’ailleurs, chaque année un kit pédagogique à destination des écoles, avec des guides pour les enseignants, afin de les accompagner dans la sensibilisation des élèves durant toute la période de collecte : des fiches, des jeux personnalisés et des campagnes emailing.
Quels sont les avantages environnementaux du recyclage des piles et batteries ? Leur empreinte carbone ?
Les piles et les batteries étant considérées comme des déchets dangereux, elles doivent être prises en charge obligatoirement dans des circuits de fin de vie et de recyclage très spécifiques. Nous ne pouvons pas les envoyer telles quelles à l’incinération ou les mettre dans les ordures ménagères. C’est pourquoi, nous les récupérons et les envoyons dans des filières qui sont agréées pour que nous puissions contrôler et nous assurer qu’il y a un bon traitement et une bonne gestion de ce type de déchet.
Le bénéfice de la collecte est avant tout de récupérer les métaux pour rentrer dans une économie circulaire par le biais de leur mise à disposition à des acteurs qui vont en avoir besoin pour d’autres utilisations. Par exemple, le zinc récupéré est utile pour les toits de Paris ou pour la fabrication des clés.
Ces acteurs préfèrent ainsi utiliser des métaux issus du recyclage plutôt que des métaux issus de mine d’utilisation primaire. Pour eux, il est plus intéressant de participer à cette économie circulaire grâce à un gisement de proximité.
Au niveau de l’empreinte carbone, la collecte des piles et batteries représente aujourd’hui un grand bénéfice. Nous avons fait une analyse du cycle de vie et nous pouvons affirmer qu’il y a un bénéfice en termes d’impact CO2. Pour vous donner une idée, le cobalt est aujourd’hui produit en République du Congo. Or, grâce à nos « mines urbaines », c’est-à-dire nos gisements de collecte, il n’y a plus d’importation et donc notre empreinte carbone est réduite. La collecte des piles et batteries a aussi un impact positif sur l’énergie et sur la consommation d’eau.
Quels sont les principaux défis rencontrés dans le recyclage des piles et comment les surmontez-vous ?
Notre problématique principale est d’arriver à toucher un maximum de personnes et de mettre en place un circuit qui soit le plus adapté possible pour pouvoir augmenter les quantités collectées chaque année.
Aujourd’hui, nous avons de plus en plus d’objets connectés, qui contiennent des piles ou des batteries. Tout l’enjeu est de savoir comment nous allons nous organiser au mieux pour récupérer ce gisement en forte croissance et quels investissements les industriels du recyclage vont devoir faire pour absorber ce gisement additionnel. Nous allons ainsi devoir réfléchir à mettre en place un circuit de réemploi pour ces nouveaux objets connectés, afin qu’ils puissent être réparés dans un premier temps ou avoir une seconde vie et servir pour une autre utilisation dans un second temps. C’est le cas par exemple des batteries des voitures qui peuvent être réutilisées pour alimenter des panneaux photovoltaïques.
L’autre sujet qui nous concerne est lié aux métaux stratégiques extraits des piles et batteries. L’objectif est d’avoir un gisement suffisant en France ou en Europe pour ne pas avoir à acheter ces métaux dans leurs pays d’origine comme la Bolivie pour le lithium ou la République du Congo pour le cobalt.
Quelles sont vos perspectives d’avenir ?
Aujourd’hui, nous sommes agréés sur 1 catégorie, demain, nous le serons sur 5 catégories. Notre périmètre d’action va donc être revu très significativement à la hausse. Nous allons collecter de plus en plus de batteries qui historiquement ne faisaient pas appel au concours d’un éco-organisme comme c’est le cas du photovoltaïque par exemple. Dans une volonté de décarboner l’industrie, nous allons devoir nous adapter à de nouveaux circuits et à de nouvelles batteries.
De même, les batteries durent de plus en plus longtemps. Aujourd’hui, une batterie dure en moyenne 7 ans et donc entre sa mise sur le marché et le moment où elle devient un déchet, le temps est long. Nous allons donc faire face dans le futur à des vagues et finalement à une collecte qui ne sera pas linéaire.
Notre filière va aussi de plus en plus concerner le secteur de la santé comme les tests d’insuline qui sont des équipements automatiques pour le taux de glucose dans le sang ou encore les appareils des personnes à mobilité réduite.